Alex, petit garçon gracieux de 9 ans qui navigue joyeusement entre les genres, a un rêve : être un jour élu Miss France. 15 ans plus tard, Alex a perdu ses parents et sa confiance en lui et stagne dans une vie monotone. Une rencontre imprévue va réveiller ce rêve oublié. Alex décide alors de concourir à Miss France en cachant son identité de garçon. Beauté, excellence, camaraderie… Au gré des étapes d’un concours sans merci, aidé par une famille de cœur haute en couleurs, Alex va partir à la conquête du titre, de sa féminité et surtout, de lui-même…
__Allociné.
Tandis que des débats douteux sur les tenues et plus généralement sur la place des femmes dans notre société se sont installés dans notre paysage médiatique, est sorti dans les salles obscures un film qui balaye tous ces préjugés avec une fraicheur insolente. Miss raconte l’histoire d’Alex qui depuis tout petit, rêve de devenir Miss France. Si le sujet prête d’abord à quelques sourires, les thématiques abordées s’avèrent au final incroyablement importantes pour une partie de la population.
Pour commencer, Miss n’est pas un film sur un personnage transgenre ; l’acteur Alexandre Wetter parle de son personnage comme une personne gender fluid((Miss interview, 21/10/2020 – Allociné)) (un terme anglais que la langue française traduit approximativement par non-binaire). J’ai trop entendu cet amalgame être fait, et je crois qu’il est important de le rappeler, même si le but du film n’est pas d’expliquer au public dans quelle case Alex se situe((Renan Cros, « Miss », entretien croisé avec Ruben Alves et Alexandre Wetter : « Je n’ai pas envie de vos cases ! », 25/10/2020 – Têtu)).
Alexandre Wetter justement, livre une prestation formidable. Sa sensibilité m’a beaucoup touché, il ne triche pas, il ne joue pas au “garçon qui se déguise en fille pour un film”, il est vrai, il est beau, il brille.
J’ai aussi beaucoup apprécié le personnage de Lola, interprétée par Thibault de Montalembert. Son jeu est aux antipodes de son rôle dans la série Dix pour cent. Cette femme transgenre est un rayon de soleil dès qu’elle apparait, et paradoxalement c’est le personnage le plus triste du film ; elle est pour Alex la guide qu’elle n’a jamais eu pour l’aider à trouver sa place dans une société qui ne les comprend pas.
Le film marche sur des œufs, cette communauté est encore tellement inécoutée qu’il est facile de se tromper. Pour autant, je trouve que le réalisateur et scénariste Ruben Alves s’en sort merveilleusement bien. J’imagine, et j’espère sincèrement que son long métrage permettra de faire bouger les lignes et rendre notre société plus tolérante.
Vous l’avez compris, j’ai vraiment aimé Miss. Cela dit, j’ai beaucoup plus de réserve vis-à-vis de tout ce qui tourne autour du concours Miss France. Si son concept est largement discutable et douteux (le personnage d’Isabelle Nanty partage d’ailleurs cet opinion), il n’est pas un sujet central du film. Le concours est ici présenté comme LE symbole de féminité par excellence, et est alors utilisé pour “prouver” aux yeux du monde qu’Alex peut mettre en avant sa féminité, jusqu’à faire oublier qu’il est un homme. Ce qui m’embête d’avantage c’est la présence de la marque Miss France au cœur du métrage. L’actualité nous le prouve1, le règlement du concours n’est plus adapté à notre société actuelle ; j’avoue alors être embêté de voir associée une marque assez peu ouverte d’esprit à un film qui prône des valeurs diamétralement opposées. Même si la présidente Sylvie Tellier semble plus ouverte que le reste du comité((M.R, Miss France: Sylvie Tellier salue l’originalité du film «Miss» !, 22/10/2020 – Ma Chaîne Étudiante)) et pourrait ainsi utiliser sa présence dans le film pour lancer un message, cette collaboration crée un léger malaise.
A l’heure où j’écris ces lignes, le second confinement est appliqué et les cinémas ont à nouveau fermer leurs portes. J’espère profondément que la projection de Miss reprendra alors quand ces derniers pourront rouvrir. Ce film est un hymne à la tolérance, d’une sincérité réelle, emmené par un acteur principal étincelant, qui mérite d’être vu par le plus grand nombre.
Informations
Miss de Ruben Alves (La Cage Dorée) avec Alexandre Wetter, Pascale Arbillot et Isabelle Nanty – sorti le 21 octobre 2020
- Une nouvelle candidate disqualifiée, 15/10/2020 – Le Dauphiné Libéré [↩]