Synopsis
Une année au coeur de l’école de la république, de la vie… et de la démerde ! Samia, jeune CPE novice, débarque de son Ardèche natale dans un collège réputé difficile de la ville de Saint-Denis. Elle y découvre les problèmes récurrents de discipline, la réalité sociale pesant sur le quartier, mais aussi l’incroyable vitalité et l’humour, tant des élèves que de son équipe de surveillants. Parmi eux, il y a Moussa, le Grand du quartier et Dylan le chambreur. Samia s’adapte et prend bientôt plaisir à canaliser la fougue des plus perturbateurs. Sa situation personnelle compliquée la rapproche naturellement de Yanis, ado vif et intelligent, dont elle a flairé le potentiel. Même si Yanis semble renoncer à toute ambition en se cachant derrière son insolence, Samia va investir toute son énergie à le détourner d’un échec scolaire annoncé et tenter de l’amener à se projeter dans un avenir meilleur…
__Allociné__
Mon avis
La Vie scolaire est un de ces films qui ne cherchent pas à présenter des gens extraordinaires ou à mettre en scène une situation incroyable ; non, La Vie scolaire dépeint avec une grande simplicité la vie d’un collège de Saint-Denis. Avec une recherche d’authenticité sincère, Grand Corps Malade et Mehdi Idir, déjà responsables du petit bijou Patients (dont je vous parlerai certainement sur Pledd), livre un second film beaucoup plus abouti que leur première réalisation. La mise en scène est entièrement au service de l’histoire, avec des effets et des astuces vraiment très simples, une lumière naturelle et une photographie réaliste, le duo de réalisateurs va au bout des choses et évite les pièges dans lesquels leur petite expérience de l’exercice pourraient les faire trébucher. La caméra s’immisce au plus près de la vie des personnages, et ne laisse respirer le spectateur qu’à de rares moments pour ancrer au maximum leur histoire dans la réalité ; certains plans d’illustrations sont mêmes dignes de plans de documentaires.
Les plus pointilleux chipoteront et reprocheront au film une mise en scène sans doute trop académique, mais au moins, La Vie scolaire a un soucis du détail qui fait plaisir à voir.
(Je me souviens d’un champ-contre-champ entre les deux personnages principaux qui résume en quelques minutes tout ce que je viens de dire).
L’histoire est directement inspirée de la vie des co-réalisateurs (également co-scénaristes du film) puisque ayant eux-mêmes suivis leurs scolarités dans la Seine-Saint-Denis. Ainsi, le film évite les clichés faciles sur la banlieue et offre un coup de projecteur honnête sur ces quartiers souvent caricaturés (à l’instar de Le Brio), et évoque des difficultés peu connues dans ces quartiers où tout le monde se connait (comment faire preuve d’autorité quand on est un surveillant qui côtoie tout le collège en dehors des grilles ?).
Nous suivons principalement Samia Zibra, une jeune CPE ardéchoise fraichement débarquée dans ce collège de ZEP, et Yanis, un élève de 3e en échec scolaire qui semble gâcher son potentiel. Gravite autour d’eux un certains nombres de personnages allant des surveillants de la vie scolaire (évidemment), des professeurs (évidemment encore), et des élèves (au final tout est logique). Dans un premier temps, j’ai vraiment apprécié que l’histoire ne tombe pas dans le cliché de “cette CPE va sauver Yanis, tous les élèves et tout le collège”, Samia n’est pas la Wonder Woman de l’Éducation nationale, c’est une CPE concernée et motivée certes, mais comme tous-tes les autres.
On en arrive au deuxième point positif : par principe (et un peu par expérience) on oppose toujours élèves et professeurs, ici ça n’est pas le cas. Illustré par un superbe faux plan séquence, La Vie scolaire met un point d’honneur à démontrer que la situation délicate des ZEP est la conséquence des élèves (en nuançant cette responsabilité) mais aussi du corps enseignant. Le meilleur exemple est la comparaison entre Messaoud, un professeur de mathématiques persuadé que ses élèves peuvent réussir et que leur origine sociale n’est pas un frein, et Thierry, un professeur d’Histoire complètement dépassé par sa classe qui a totalement perdu de vue son statut d’éducateur et la passion qui est censée animer les enseignants.
Et troisième point positif, le film est une fresque de la vie quotidienne (c’était déjà le cas pour Patients), ainsi, les rires (cf : le prof d’EPS) et les larmes s’enchainent en un claquement de doigts.
Du côté des acteurs, Grand Corps Malade et Mehdi Idir ont choisi d’aller chercher des illustres inconnus pour interpréter les collégiens ; le résultat est vraiment convaincant. Cette décision entraine un petit manque de justesse par moment dans les dialogues, mais ces jeunes acteurs sont bluffants le reste du temps ; Liam Pierron en tête de liste, son avenir semble tout tracé. Pour le reste du casting, les réalisateurs ont décidé de prendre des visages peu connus du grand public (là encore par soucis de réalisme sans doute). Je m’attarderai sur Zita Hanrot, qui offre une prestation tout à fait convaincante, loin de son rôle de jeune femme candide dans Plan Coeur.
Pour terminer, je note que contrairement à Patients, la musique originale est un petit peu plus en retrait. Le film privilégiant les chansons additionnelles aux compositions originales. Et enfin, le générique de fin vaut vraiment le coup d’œil puisqu’il présente et permet de mettre un visage à tous ces noms qui défilent et met en lumière tous ces travailleurs de l’ombre. Le geste est suffisamment noble pour être signalé.
La Vie scolaire est un coup de projecteur honnête sur la banlieue et un film véritablement humain et humaniste. On s’attache à ses personnages et on vit avec eux leurs joies et leurs tristesses. Encore une fois Grand Corps Malade et Mehdi Idir livrent un long métrage tout à fait abouti et réussi.
Informations
La Vie scolaire de Grand Corps Malade et Mehdi Idir (Patients) avec Zita Hanrot, Liam Pierron, Soufiane Guerrab – sorti le 28 août 2019