Spider-man est avec Batman le super-héros le plus exploité au cinéma. Avec trois interprètes et sept films en dix-huit ans, la licence est une des plus prolifiques du studio Sony Pictures.
Sortis respectivement en 2002, 2004 et 2007, la saga de Raimi compte trois opus : Spider-man, Spider-man 2, et Spider-man 3 et met en scène les aventures de l’homme araignée ; de la morsure jusqu’à son épanouissement en tant que super-héros, toute la mythologie du personnage est racontée. En prenant le temps de présenter les différents dilemmes qui l’entourent, le super-héros trouvera son accomplissement personnel à la toute fin de Spider-man 3.
Après une longue phase de discussion autour d’un potentiel Spider-man 4, Sony Pictures met fin à cette période de rumeurs et décide de rebooter la licence (pour ne pas perdre les droits d’exploitation). Une nouvelle saga réalisée par Marc Webb voit le jour, seulement composée de deux épisodes intitulés The Amazing Spider-man et The Amazing Spider-man : le destin d’un héros, met d’avantage en avant ses personnages et les dilemmes moraux qui les entourent.
Aujourd’hui, il est de bon ton de dire que la trilogie de Sam Raimi est une réussite absolue, que Spider-man 2 est un chef d’œuvre, et que la duologie de Marc Webb ne mérite pas d’exister.
Malheureusement pour moi, la saga initiée en 2002 a tendance à m’ennuyer alors que le remake m’émeut comme de rare œuvres ont pu le faire. Voyons en quelques points pourquoi je préfère largement The Amazing Spider-man.
Spider-man
Il semble assez évident que l’interprète principal tient un rôle important dans cette comparaison. A l’époque, tout du moins avant la sortie des Amazing Spider-man, Tobey Maguire était à mes yeux un excellent choix de casting, même si avec un peu de recul il m’a vite paru trop vieux pour être crédible en lycéen de 18 ans (il avait déjà 26 ans pendant le tournage de Spider-man). Il est vrai qu’il incarne parfaitement un Peter Parker maladroit ; mais à l’image des films, son jeu est parfois caricatural (en résulte une quantité faramineuse de mèmes sur les internets). Mais admettons, c’est surtout l’écriture à sens unique du personnage qui m’embête :
super loser du lycée –> morsure –> lycéen super cool.
Le personnage d’Andrew Garfield, au-delà d’une coolitude naturelle, est déjà plus nuancé ; il est d’avantage un lycéen invisible qu’un raté. Mais il n’a pas attendu la morsure de l’araignée pour faire preuve de courage et de quelques moments de bravoure. Grâce à son jeu d’acteur et à son écriture, s’identifier à lui est beaucoup plus évident puisque son personnage existe dans tous les lycées du monde. Et puis il fait du skateboard, donc rien que pour ça il a toute mon affection.
Les motivations du tisseur sont assez similaires dans les deux films, mais The Amazing Spider-man prend d’avantage de temps pour les traiter ; exceptée la phrase emblématique d’Oncle Ben qui résonne dans la tête de Peter Parker, ses motivations dans Spider-man sont rapidement traitées pour “vite vite voir le super-héros”. Le costume est mieux amené et plus réaliste, et les cabrioles de l’araignée sont également plus impressionnantes dans le reboot (tout du moins dans TASM 2).
Les personnages
Ce que je n’ai jamais apprécié dans la trilogie de Sam Raimi, c’est ce triangle amoureux et cet interminable jeu de “je t’aime/moi non plus” auquel jouent les personnages. Nous ne sommes plus dans un amour impossible mais dans une romance plombante sans grand intérêt. Au moins, Marc Webb clarifie la situation dès le début : Peter et Gwen s’aiment et elle connaît son identité secrète ; ensuite il mettra cette relation en péril et nous impliquera émotionnellement.
Globalement, le réalisateur de (500) jours ensemble est beaucoup plus à l’aise pour développer ses personnages. Et au risque d’en choquer plus d’un, Spider-man 2 est le métrage que j’apprécie le moins, puisqu’il est celui qui s’intéresse le plus à ses protagonistes.
Il est souvent reprocher aux ennemis de The Amazing Spider-man d’être caricaturaux. C’est vrai qu’ils n’ont pas le mérite d’être très développés, mais a-t-on seulement regardé d’un peu plus près les méchants de Spider-man ? A part le Docteur Octopus à qui le traitement est approfondi et abouti, les autres ne sont pas beaucoup plus convaincants ; Willem Dafoe ne fait que se déhancher avec un air méchant en déblatérant des monologues sans réelles profondeurs, James Franco abuse de son air dark pour faire comprendre qu’il est vilain, et Topher Grace fait ce qu’il peut pour rendre son Venom crédible. Bref, je ne comprends pas ce qu’on reproche à Rhys Ifans, Jamie Foxx et Dane DeHaan ; leurs performances et l’écriture de leurs personnages ne sont certes pas mémorables, mais ne sont pas plus mauvaises que ceux citées plus haut.
Quant au love interest, je pense qu’il n’y a pas de débat. Dans les deux films, Emma Stone interprète une Gwen Stacy en première ligne qui prend part aux péripéties, à plusieurs reprises elle apporte une aide capitale au tisseur ; tandis que Mary-Jane ne se contente de n’être qu’une Mary Sue qu’il faut à chaque fois sauver. C’est très redondant et manquant de réalisme.
En revanche, Spider-man jouit d’un personnage que Marc Webb n’a pas tenté de réadapter au risque de s’y casser les dents : J.Jonah Jameson. Bien aidée par une ressemblance évidente, la performance de J.K. Simmons est parfaite. Plus généralement, la vie au Daily Bugle est une vraie réussite et manque au reboot.
La réalisation
Je suis forcé d’admettre que Spider-man a révolutionné Hollywood ; il a permis aux super-héros d’avoir des films sérieux et décomplexés (à l’inverse de X-men qui avait d’avantage de gravité). Sans cette trilogie, pas d’Avengers par exemple. Les acrobaties de Spider-man sont impressionnantes et n’existaient pas sur grand écran avant cette adaptation ; plus généralement, cette saga compte de nombreuses scènes emblématiques. Mais, dix-huit ans plus tard (mon dieu… dix-huit ans, on est tellement vieux) Spider-man et ses suites ne vieillissent pas bien ; la réalisation et la photographie de Raimy paraissent kitsch, le New-York ne semble pas réel et fait assez fake. Sans se laisser influencer par les standards ternes et sombres du moment, les couleurs sont trop criardes, trop saturées et emmènent les métrages dans une temporalité impossible à dater (le même symptôme que Superman Returns qui peut se passer autant dans les années 60 que dans les années 2000). Les films de Marc Webb bénéficient d’une mise en scène d’avantage moderne et rythmée (l’époque et le passage du MCU ont beaucoup inspiré). Les scènes d’actions sont grandioses, plus percutantes, riches d’inventivité ; je n’oublierai jamais cette bataille à la centrale électrique, rythmée par de la Dubstep orchestrée par Hans Zimmer. Malgré une approche originale, force est de constater que la composition de Danny Elfman est plus efficace et plus marquante que celle du reboot.
Cela dit, les défauts justement reprochés à The Amazing Spider-man sont liés à la pression mise par le studio pour accélérer la production du métrage, nuisant à la création artistique du métrage ; The Amazing Spider-man 2 a démontré qu’avec du temps, Marc Webb était capable de bien mieux.
Ok, ok, j’entends certains d’ici, rien n’égale la scène du métro de Spider-man 2, c’est vrai, elle vaut carrément le coup, mais sans le vouloir, le climax de Spider-man 3 m’a toujours d’avantage fait vibrer que la scène du métro. Désolé.
L’écriture
Là encore, il n’y a pas de débat de mon point de vue. Certes la saga de Raimi est à l’origine d’une des plus grandes répliques de la pop culture, encore utilisée ou parodiée aujourd’hui : “un grand pouvoir implique de grandes responsabilités” et assez honteusement copiée dans les films de Webb “Il ne s’agit pas de devoir, mais de responsabilités” ; mais malheureusement, la trilogie Spider-man semble incapable de passer à autre choses et use jusqu’à la moelle cet adage, aussi fabuleux soit-il. C’est à chaque fois le Deus Ex Machina utilisé par les scénaristes pour ramener Peter dans le droit chemin.
The Amazing Spider-man, en plus d’une approche plus sombre, plus sérieuse et plus réaliste (The Dark Knight est passé par là), se sert moins de Ben Parker comme d’ombre paternelle à notre héros puisque ce rôle est tenu par son père, qui fait partie intégrante de l’histoire de la duologie. Ça manque souvent un peu de finesse, mais ça a le mérite d’apporter à l’histoire de Spider-man des éléments inédits. Plus globalement, la saga Amazing compte d’avantage de personnages jouant le rôle de repère moral à Peter, permettant aux films de développer plus en détails les différentes facettes du personnage d’Andrew Garfield. Comme énoncé plus tôt, la saga de Marc Webb gère nettement mieux ses personnages.
N’allez pas croire au final que cet article a pour but de cracher sur la trilogie Spider-man ; je cherche d’avantage à faire remonter The Amazing Spider-man dans l’estime des gens en lui criant tout mon amour grâce à une comparaison assurément subjective. Je n’oublie évidemment pas que nous opposons deux visions différentes d’une même histoire, révélatrice de la richesse du personnage que nous aimons tous et qui, vingt ans plus tard, continue de vivre des aventures sur grand écran ; et qui encore une fois, est loin de faire l’unanimité.